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Le noeud

 

La galère fendait les eaux depuis 2 semaines quand une terrible tempête se leva.
De mémoire de Grec, on n'avait jamais vu un tel ciel :
noir comme l'ébène, lourd comme du plomb et menaçant comme une armée d'Erinyes.

C'était l'époque où l'on ne savait pas encore naviguer en remontant le vent
mais seulement en vent arrière, les voiles en biseau,
gonflées à craquer par le zéphyr en furie.

Armatios, le capitaine, tentait de garder son sang froid :
il aurait voulu être partout en même temps.
A l'avant pour motiver ses hommes, au pied du mât pour rabattre un peu la lourde toile,
mais il se devait de rester à l'arrière pour maintenir le cap et le lourd safran en place.
Il hurlait ses ordres, aussitôt emportés par la tempête dans les flots grondant.

Soudain, une drisse céda sous la force conjuguée des éléments :
"Capitaine ! Capitaine ! La voile est déchirée, que fait-on ?
Nous allons nous écraser contre les récifs si le vent ne nous dirige plus...!"

Armatios, toujours debout à l'arrière de la galère, cria : "Je ne peux lâcher la barre,
que l'un d'entre vous rattrape la drisse et la noue le plus solidement
pour qu'elle ne s'échappe plus.
Il sera récompensé celui qui parviendra à nouer le bout et rétablir l'assiette du navire."

Alors les hommes se regardèrent et l'un d'eux dit :
"Laissez faire, je connais par coeur le triple noeud de chaise. "
Il rattrapa la drisse et entreprit de la nouer
mais ses efforts furent interrompus par une nouvelle bourrasque et il lâcha prise.
Le navire se rapprochait dangereusement des rochers.

Un second marin rattrapa à temps la drisse folle et dit : "A moi !
Je sais faire mieux que personne le quadruple noeud de cabestan !
" Mais le vent arracha la drisse de ses mains calleuses alors
qu'il était en train d'entamer le quatrième noeud...
Le temps était compté : la galère était encore plus proche des récifs.

Enfin, un troisième marin s'empressa de rattraper le bout et assura
qu'il était "certain, par Zeus, de bloquer cette drisse avec un tour mort et deux demi-clés".
Peine perdue : avant que la deuxième demi-clé ne fut nouée,
une lame plus forte que les autres avait nettoyé le pont et fauché les hommes.
La galère n'était plus qu'à une encablure du rivage hérissé de rochers.

C'est alors qu'Armatios, excédé par l'incompétence
et la vantardise de ses marins donna la barre au second
et vint lui-même attraper la drisse.
En un tournemain, le bout fut noué et la voilure rétablie
permit à la galère de retrouver un semblant de stabilité dans les éléments en furie.

Le courage et la force de leur capitaine avaient réduit les hommes au silence et,
dans le vacarme du vent et des vagues,
Armatios hurla ces paroles décisives : "Bande d'incapables !
Vous savez pourquoi je suis votre capitaine ?
Ce n'est pas parce que je suis plus fort ou plus habile !
Je ne connais pas plus de noeuds que vous :
mais je sais quel noeud convient le mieux à la situation.
Je ne vous avais pas demandé de prouver votre expérience,
je vous ai simplement demandé de faire un noeud solide !"

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Les paroles d'Armatios ont beau être brutales, elles n'en sont pas moins vraies:
dans la vie courante, dans une situation professionnelle,
à chaque fois que l'on exige de vous que vous solutionniez rapidement
et complètement un problème, ce n'est pas la démonstration de votre expérience
qui intéresse le donneur d'ordre,
c'est l'application de cette expérience à l'identification et à la solution d'un problème.

Source: Transmis par Josy ...www.lespasseurs.com



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